BAISIEUX VILLE DU HAINAUT

Remerciements à Mr Michel Tromont

BAISIEUX, HISTOIRE, PATRIMOINE

Textes extrait de "Le vent des Honnelles m´a dit..." de Mrs Alain Audin et Charles Cambier

LA SEIGNEURIE

Domaines et Châteaux

Ce serait sur l'emplacement des basses-eaux que se fixa et se fortifia un castel, qui en prit le nom. On aperçoit encore trace des anciennes fortifications du château, rasé sur ordre de Jacqueline de Bavière. Les derniers vestiges sont minces : quelques voûtes, un mur à demi-écroulé dans la petite Honnelle. Et pourtant, le château de Baisieux fut, lui aussi, synonyme de grandeur et de puissance. En cette période féodale, un fils de Baisieux, Jacques, s'en allait de castel en manoir fredonner ses complaintes, et ce trouvère de chez nous acquit une réputation telle qu'il fut le plus grand des troubadours du XIIIe siècle. Jacques de Baisieux chantait l'amour, et les dames languissantes fredonnaient à la veillée ses... « Viens, ion, Ion, faire pour de bon nique à Lucifer... ». Mais, en ces temps où l'on chantait, des gens mourraient parce qu'ils étaient laids, ou trop beaux. Les bûchers se dressaient, et l'on s'y retrouvait la proie des flammes pour un oui, pour un non. Comme cette fille qu'un moine égrillard punit, du refus qu'elle lui avait opposé, en la condamnant pour crime de « sorcellerie » ou en criant à la « cathare ». Le château de Baisieux portait le nom des « de Maugré et fournissait régulièrement de ses fils à l'Eglise. On rencontre, bien entendu, un Jean de Baisieux en 1198, aux Croisades, et un autre Gilles, en 1242, dont la femme, Oda, fit présent aux abbés de Saint-Ghislain de grands biens situés à Angre.

Destruction du Château

La forteresse de Maugré fut prise d'assaut par les troupes du Duc Albert de Bavière, désireux de s'emparer du sire d'Enghien, Siger II, qui y avait trouvé refuge. Il faut dire que Siger lui contestait la succession du Comté, et qu'Albert, Régent du Hainaut, voulait à tout prix éviter une telle concurrence. Or donc, le 18 mars 1364, Siger tombe entre les mains de son puissant adversaire. En dépit des suppliques des Nobles, on lui tranche la tête au Quesnoy. Tous pouvoirs confirmés, le vilain Régent fit, assure-t-on, un geste de balancement du bras qui voulait dire aux Barons en quelle haute estime il les tenait.
Sa petite-fille, Jacqueline de Bavière, s'en vint livrer, de son droit de « Comtesse du Hainaut libre et indépendant », siège et bataille devant les murs de Baisieux qui, à côté de la châtellenie de Quiévrain, se dressait toujours comme un obstacle aux ambitions des Princes. On sait comment Jacqueline fit passer son héritage entre les mains de Philippe le Bon. Le Beau Pays de Hainaut devenait bourguignon, et un jour, le Valenciennois s'en viendra mourir aux portes de Baisieux. La puissance hennuyère, dont les rois de France et d'Angleterre avaient essayé de se concilier les bonnes alliances, avait vécu.
En 1578, le duc d'Alençon rasa derechef le manoir. Celui-ci ne s'en remettra plus. Le village n'eut pas un sort meilleur : pour nettoyer par le feu la secte des protestataires, on livra aux flammes les maisons de Baisieux. Drôle d'époque, en vérité, où des troupes en tous genres, dont celles, orangiste de Nassau, foulent nos campagnes. Les protestants profitent d'un bout de territoire contesté par les abbés de Saint-Ghislain, et Seigneurs de Dour pour développer leur communauté dans cette dernière cité. Si des réformistes sauvent ainsi et leur vie, et leur foi, des troupes d'Orange détruisent, dans les paroisses, maints objets d'art et moultes archives, sauf à Frameries qui y échappe. Ainsi, des braves gens mouraient pour la manière dont ils priaient Dieu. Le Duc d'Alençon, qui soutenait la Réforme, souhaitait régner sur nos provinces en lieu et place de Philippe II d'Espagne. Repoussé par l'opiniâtreté des Montois, le Duc et ses gens, par dépit, se livrèrent à des exactions en tous genres dans l'arrière-pays. Elouges fut complètement désertée. Baisieux, comme nous l'avons dit, incendiée. Ce n'était que partie remise, puisqu'en août 1649, les hommes de guerre français refirent brûler Baisieux comme une torche. Fait de baraques et de torchis, tout Baisieux fut la proie des flammes, à l'exception de deux fermes construites en matériaux plus solides et qui se trouvaient un peu à l'écart. L'une d'elles appartenait depuis le XlVe siècle à la famille Dubois-Hallet.

Maison de Maugré

Ce nom n'a rien à voir avec un mauvais sort qui aurait été jeté au château-fort par le Duc d'Alençon ou quiconque. En 1300, déjà, on trouvait une seigneurie, apanage de Jean de Maugré, dont le nom tire sans doute son origine d'un ancêtre de mauvaise composition, condamné par des anathèmes dont on attribua la paternité à des personnes apparues ultérieurement, anathèmes par lesquels le village se voyait condamné à être rayé de la carte plusieurs fois. On a connaissance d'une donation faite à l'abbaye de Saint-Ghislain par Gilles de Baisieux, sans que l'on spécifie s'il s'agit d'un Maugré. A côté de Baisieux, plusieurs fiefs de moindre importance existaient, dont celui de la Motte, qui appartenait à la Maison de Quiévrain, et à Charle de Vauderie qui, en 1621, rejoignit la seigneurie de Maugre, avec Château, Justices et nombreux biens.

La rectification de la frontière en 1779

Peu de Basicomiens se souviennent encore que le territoire de leur village n'a pas toujours été aussi étendu que celui qu'ils connaissent aujourd'hui. Il a fallu une rectification de la frontière franco-belge ou plus exactement franco-autrichienne, en 1779, pour que le Petit-Baisieux, le Château de Quiévrechain et les Monts de Baisieux (ainsi que le village de Marchipont) deviennent belges. Des bornes marquent encore les limites de l'empire autrichien en territoire belge.
Le Docteur Antoine BRICHE, ancien maire de Quiévrechain, raconte cet événement dans l'Histoire de la Seigneurie de Quiévrechain, publication du Cercle archéologique et historique de Valenciennes, en 1976 (p. 195-196).

Le Château de Quiévrechain (Bracq-Pion)

Laissons-lui la parole : "Victorieux après la bataille de Fontenoy gagnée par le Maréchal de Saxe, le Roi Louis XV va, en application de l'article 18 du traité d'Aix-la-Chapelle, attacher sa diplomatie à la tenue de conférences franco-autrichiennes destinées à réaliser cette frontière linéaire conventionnelle qui, de nos jours, nous sépare de la Belgique.

Entre Condé et Malplaquet la frontière avait besoin d'être simplifiée et rectifiée. Le désir du gouvernement français était de prendre pour limite le cours de l'Honneau sur toute sa longueur, solution simple à première vue mais qui aurait entraîné des échanges de terres très étendues entre l'Autriche et la France, laquelle, par exemple, aurait abandonné les seules carrières de pierre, celles de la prévôté de Bavay qui fussent à la portée des villes de Valenciennes, Condé et Bouchain.

A Quiévrechain qui s'étendait alors jusqu'à cette rivière, la situation de la frontière était confuse car il y avait çà et là des enclaves autrichiennes comme le Petit Baisieux et la Cense Raucourt ; le plus simple pour y remédier était de ramener la limite à l'Aunelle.

La France hésita longtemps à en venir là parce que c'était abandonner, outre le Mont de Baisieux, le Château du seigneur et on redoutait que ce dernier n'appelle à lui les habitants du village, d'autant que les meilleures terres seraient également du côté étranger (belge) de la nouvelle limite, c'est-à-dire l'Aunelle, et qu'il y avait donc lieu de craindre que le village se dépeuple. Ce fut pourtant cette solution qui fut adoptée et les Commissaires français et autrichiens parvinrent à évaluer, compte tenu des enclaves étrangères, les surfaces des terres situées au-delà de l'Aunelle à Quiévrechain et à Marchipont que le Roi de France abandonna soit le tiers de notre territoire en échange d'un équivalent à prendre à Sa Majesté l'Impératrice-Reine dans la prévôté de Bavay.

Enfin, le 18 novembre 1779 fut signée à Bruxelles la convention franco-autrichienne qui réglait la situation des terres contentieuses, puis le 22 juin 1780 eut lieu au Château de Quiévrechain, en présence d'un représentant de Sa Majesté l'Impératrice. Reine de Hongrie et de Bohême, la cérémonie de prestation de serment et de passation de pouvoir. Y assistaient : messire Jean-Pierre Joseph de Colins, seigneur du lieu, le mayeur Daniel Lecocq, Claude Coquelet, lieutenant mayeur, Guillaume Laoust, Pierre-Joseph Lenglet et Jacques-Joseph Equipart, Echevins de la communauté.