BIENFAISANCE PUBLIQUE
Hôpital Saint-Nicolas
Quiévrain possédait jadis un établissement de bienfaisance désigné sous le nom de l’hôpital de Saint-Nicolas, crée au commencement du XVe siècle par Jeanne de Lalaing, dame de Quiévrain,
pour y nourrir les pauvres, les veuves et les orphelins. Cette dame fit plusieurs fondations pieuses dans la chapelle de cet établissement ; Philippe de Croy, seigneur de Quiévrain,
mort en 1549, lui donna également une somme de 1.200 livres ; d’autres seigneurs y firent aussi certaines donations.
En 1635, l’hôpital de Quiévrain avait un revenu de 160 livres en argent ; le fermage des propriétés rapportait annuellement 1.877 livres
Un compte de 1616 nous apprend que la chapelle avait un musicien à gages nommé Claude Delacourt. Un compte de 1666 renseigne des dépenses faites pour la restauration de la chapelle et
des ouvrages de peintures exécutés par Antoine Cocqueau.
L’hôpital de Quiévrain a cessé d’exister en 1823 ; à cette date les bâtiments servaient d’habitation au vicaire de la paroisse. M. Hochart, curé, profita de cette circonstance
pour revendiquerr les bâtiments comme propriété de la fabrique. Le bureau de bienfaisance le débouta de ses prétentions et vendit les bâtiments à M. Olivier. C’est la maison située
près du pont de l’hôpital.
Compagnie des Sapeurs-Pompier
Vers la fin du XIXe, lorsqu'un incendie de déclenchait, l'affolement gagnait de maison en maison, de quartier en quartier. Le manque d'eau, voire la sécheresse, la faiblesse des moyens immobilisaient les populations volontaires. Le sceau, qui servait à véhiculer l'eau, passait de main en main, arrivait au terme de sa course à moitié vide...
Les plus vaillants perdaient vite courage devant l'ampleur du désastre. Il ne restait qu'à attendre la fin du sinistre et, dans toute la mesure du possible, à protéger le voisinage immédiat.
A Quiévrain, la présence de la ligne internationale du chemin de fer du Midi (Bruxelles-Paris), de la ligne de Dour-Borinage, de l'entrepôt de la station, de l'arsenal, des petites industries annexes et autres fabriques de graisses et d'huiles, nécessitait la prise de mesures énergiques afin d’éviter tout désastre.
En 1885, l'Arsenal de la station devenait dépositaire d'une pompe à bras. Les ouvriers du chemin de fer en assuraient la "manœuvre". Ces quelques personnes devaient, jusqu'à la fondation de la compagnie, assurer l'entière protection de Quiévrain.
Deux sinistres importants : celui du Moulin Braquet, à la rue du Pont Saint, et celui du Moulin du Corbeau, au pont français incitèrent les autorités communales à prendre la décision de fonder un corps autonome de sapeurs-pompiers. C'est ainsi que le 15 décembre 1908, le Conseil Communal de Quiévrain, présidé par le Bourgmestre Jules PITOT, décide de fonder une compagnie de sapeurs-pompiers et fait appel aux hommes de métier de la localité. Le président d'honneur en était M. Lacroix et le président M. Charles Bataille, M. Marius Liévin assurait le commandement de l'unité et M. Baguet avait été nommé sous-lieutenant quartier-maître. A sa fondation, elle comptait 30 membres et disposait d'une pompe à bras, de deux dévidoirs, deux échelles à coulisses, deux échelles de dix mètres. Le baptême du feu de la nouvelle compagnie eut lieu le 21 février 1910.
Quelques grandes dates marquent encore l'histoire de la compagnie. Nous notons tout particulièrement :
1918 : Quiévrain est ravagé lors des bombardements de toute la région frontalière.
1940 : Seconde guerre mondiale où les pompiers, à cette époque meurtrie, ne purent opposer qu'une vaine résistance aux destructions dues aux bombardements incendiaires du mardi 14 et du vendredi 17 mai.
Fin des hostilités : il s'agissait avant toute chose, d'organiser, de recruter, de faire subsister une unité nouvelle. Le premier camion spécialisé est acheté.
1970 : Albert DERAMAIX est promu Capitaine-Chef de service. La compagnie, déjà très bien structurée sous l'impulsion de ses prédécesseurs ne cesse d'évoluer, le matériel devient de plus en plus important et suit l'évolution technique.
La Défense Aérienne Passive (D.A.P.)
(Documents provenant de Mr Jules DELADRIERE, commandant de la D.A.P.)
Formée au début de 1938, la ligue de protection aérienne était présidée par Monsieur Victor Antoine PITOT, bourgmestre et Monsieur BOSQUET F. Directeur.
Un centre école, sous la direction de Monsieur le Docteur DELOUYS professeur de la section croix rouge, des professeurs des classes techniques Messieurs DENGHIEN, DUFER et de Mademoiselle BOURDON, permit d'attribuer 63 brevets, en deux sessions, sur les matières suivantes :
- Cours généraux :
- Danger aérien
- Avions de bombardement
- Toxiques de guerre
- Mesures d'ordre général :
- Dispersion - Alerte – Lumières
- Les appareils de protection
- Les bombes incendiaires
- L'organisation communale de la défense passive
- Cours spéciaux :
- Port du masque
- Passage en chambre infectée
- Etude de l'action et de l'extinction de la bombe "ELEKTRON"
- Participation à des essais d'alerte
- Transport des victimes
- Cours techniques spécialisés :
- La mission de l'agent de protection
- La détection par des procédés simples
- Désinfection par des procédés pratiques
- Premiers soins à donner aux victimes
Mademoiselle BOURDON fit de nombreuses conférences à Quiévrain et dans les localités voisines.
La mobilisation du 03 septembre 1939 vint totalement bouleverser cette organisation.
Les éléments féminins furent supprimés, les hommes des différentes classes de milice furent mobilisés, il ne restait donc de tous les volontaires de la D.A.P. que quelques brevetés.
Le ministère de la Défense Nationale ayant ordonné le recrutement de la garde civile territoriale, 115 hommes furent incorporés et mis immédiatement à l'entraînement.
La localité fut divisée en six secteurs ayant chacun son équipe de quartier sous la direction d'un chef de secteur.
Au poste central deux équipes spéciales (Désinfection et détection ainsi que l'équipe de Déblayeurs)
Au château de Monsieur BATAILLE le poste de croix rouge.
La compagnie des sapeurs-pompiers dont le matériel était alors pratiquement inexistant (la pompe était actionnée à bras - les véhicules à matériel étaient poussés à bras) et les tuyaux trop peu nombreux, trop vieux, était placée sous les ordres du Commandant DRUART.
Tous les gardes furent munis du masque passif et d'un casque. Les pelles, pioches, leviers et autres outils furent rassemblés grâce à la bonne volonté des habitants.
Deux combinaisons spéciales imperméables sont à la disposition de l'équipe de désinfection et de détection qui seule est dotée du masque actif.
Compte rendu du début de l'invasion Allemande à Quiévrain
- Vendredi - 10 Mai 1940
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06h00 : Toutes les formations sont à leur poste d'alerte.
Toutes les dispositions sont prises pour l'occultation.
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10h00 : La frontière Franco-Belge est ouverte aux troupes alliées, des avions Allemands mitraillent la grand-route Valenciennes-Mons, plusieurs soldats Français sont blessés.
Des gardes civils ont renforcé le service d'ordre sur tout le parcours.
A la tombée de la nuit le balisage de la route venant de France s'établit dans la traversée de la commune depuis la frontière jusque la rue de Mons.
Toutes nos lampes tempête sont placées à droite (marchant vers la Belgique) et à toutes les courbes.
- Samedi - 11 Mai
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Dès le matin les réserves de mobilisation affluent et il faut les loger dans tous les établissements publics, salles de fêtes, cinémas, écoles etc.
De nombreuses alertes.
- Dimanche - 12 Mai
- Tout est comble, le flot humain déferle et il faut le disperser vers les villages voisins.
50 gardes civils sont continuellement en route vers Montroeul-sur-haine, Hensies, Thulin, Elouges, Audregnies, Baisieux, Angre pour y piloter les groupes.
Les services de police D.A.P. sont surmenés car ils doivent diriger les convois civils vers les routes secondaires, l'axe principal étant réservé aux armées.
Les régiments de forteresses de Liège ont reçu comme point de ralliement Quiévrain.
Il devient très difficile de se ravitailler et l'on doit installer une cuisine à l'école des filles de la rue du Joncquois (direction Melle BOURDON).
Du ravitaillement a été demandé aux autorités militaires.
Tous les services sont établis avec l'aide de la garde civile.
- Lundi - 13 Mai
- Les réfugiée arrivent de partout, mais la frontière Franco-Belge est fermée, les avions ennemis survolent toujours la localité.
Nous avons installé un bureau de renseignements à l'usage des personnes de passage qui cherchent des membres de leur famille.
La foule grossit, les rues, les maisons particulières sont encombrées.
Il n'est plus possible de se ravitailler, tous les magasins sont vidés et les boulangers ne peuvent subvenir aux besoins de tout ce monde.
- Mardi - 14 Mai
- Il y a alerte sur alerte. L'on doit tout craindre, c'est la cohue et l'on a bien de la peine à évacuer les effectifs militaires de réserve et les réfugiés.
Deux trains seront formés dans l'après-midi et de toute la journée les abords de la gare sont noirs de monde.
- 19h00 : Des avions ennemis bombardent les secteurs 2 et 3.
Les rues menant place de la gare et la rue du Joncquois sont barrées.
Rue du joncquois, une torpille a littéralement écrasé la demeure de Melle FABRY dentiste, il y a de nombreux morts.
Place de la gare, il y a beaucoup de victimes. 3 bombes ont soufflé les devantures de plusieurs cafés.
Dans la gare deux autres projectiles ont éclaté dans les voies sans causer de dégâts.
- 19h30 : Monsieur BOURLET chef D.A.P Hensies, se met à notre disposition avec 10 hommes.
Tous les services sont sur les lieux sinistrés.
Monsieur FRANCOIS Albert, chef du secteur 3, a organisé dans une de ses maisons un poste de croix rouge.
Il y a soigné de nombreux blessés très grave, entre autres, un éventré et deux amputés.
Le service de transport automobile évacue le plus possible les blessés vers le poste de secours du docteur DELOUYS, puis vers les hôpitaux du Borinage jusque 02h00 du matin. Les derniers blessés sont évacués vers la France car il n'y a plus de place en Belgique.
Au cours du bombardement 2 gardes ont été légèrement blessés et 5 ont leur demeure sinistrée. Toutes les équipes ont parfaitement fonctionné.
- Mercredi - 15 Mai
- Les groupes de déblayeurs, d'infirmiers, de transport et de police ont travaillé toute la nuit.
L'état permanent d'alerte est décrété, nous sommes survolés par des avions allemands.
La panique gagne la population et les maisons se vident peu à peu.
75 membres de la garde civile sont mobilisés dans l'industrie française. Ce soir, nous devons changer le balisage de la route, le porter du côté opposé, soit pour le retour vers la France.
- Jeudi - 16 Mai
- La mesure prise hier par le gouvernement français, de mobiliser tous les travailleurs de l'industrie, nous a désorganisés et presque supprimé nos effectifs.
A la suite de cette mesure nous centralisons tous les services. Les effectifs de la D.A.P. porteront leurs efforts vers l'endroit sinistré, sans désignation de secteur. Toutefois chaque chef de secteur reste en place ainsi que son agent de liaison.
Les estafettes cyclistes du pote central assureront la surveillance par des rondes.
- Vendredi - 17 Mai
- C'est l'exode... l'affolement, dans le bruit lugubre des sirènes, du vrombissement des avions ennemis, des colonnes en retraite et des racontars alarmistes.
Il reste 25 hommes de la D.A.P. pour assurer la protection de Quiévrain.
Des déblayeurs sont occupés à inhumer les victimes du bombardement du 14.
- 14h00 : Deux avions allemands lancent deux bombes ruelle Clerson tuant un ouvrier de Thulin.
Deux autres bombes sont tombées également rue de Dour détruisant deux maisons, tuant un homme et blessant grièvement sa femme.
- 16h00 : L'état-major Belge de Valenciennes fait demander s'il est possible de réquisitionner un camion automobile, mais il n'y a plus un véhicule à trouver ici.
- 17h00 : Bombardement en règle de la cité, par 3 escadrilles de 6 avions à croix gammées, qui pilonnent les quartiers de la rue de Mons, rue de Dour, rue du Tombois, nouvelle place, rue de la gendarmerie, rue Jules Pitot, rue des Wagnons, rue Grande, rue de Valenciennes, rue du Joncquois (passage à niveau). Un avion anglais ayant attaqué les escadrilles allemandes a été Abattu au lieu dit "le plus court". Le pilote a été tué.
Les projectiles pleuvent et les grappes de bombes incendiaires complètent l’œuvre de destruction. La Cure, la maison de Mr DRUART commandant des pompiers, la maison de Mr Emile CROIX flambent.
Nous avons d'abord songé aux victimes. Toute la famille TERLET a été écrasée dans sa maison. La famille NAMUR a été ensevelie sous les décombres - Valère DECLERCQ et DONY avec des moyens de fortune ont dégagé Melle RENAUD et sa tante, saines et sauves toutes les deux. Le jeune fils RENAUD est grièvement blessé aux jambes tandis que sa mère et 3 soldats sont trouvés morts dans les ruines.
Rue du Tombois, un homme a été heureusement dégagé des restes de sa maison qui le bloquaient dans sa cave.
Il reste des blessés dans l'abri, poste de secours, du château BATAILLE où une bombe est tombée sans pénétrer et sans dégâts. Toutefois, le souffle de ce projectile a projeté le Docteur DELOUYS au fond de l'abri, le Docteur quoique souffrant put continuer à soigner tous ceux qui attendaient ses secours. Il fut le seul médecin pendant tous ces jours tragiques, de plus le bombardement lui a détruit tout son matériel et tout son mobilier.
Tout est fini, ce n'est qu'épouvante et horreur, les canalisations d'eau et de gaz sont brisées en de multiples endroits, les fils électriques sont arrachés partout des poteaux.
MEURHYS Arthur et GIVAIR Joseph ont coupé la distribution au château d'eau. Tous les services D.A.P. sont épuisés, plus de matériel, plus de transports, plus d'eau ni de lumière... Il reste quelques blessés à évacuer.
- 21h00 : Je téléphone et c'est le service de campagne Français qui me répond sous le pseudonyme "Le Renard".
Je demande des secours pour évacuer les derniers blessés de toute urgence, la croix rouge de Valenciennes me promet d'envoyer des voitures...
J'ai arrêté des colonnes de transport de blessés qui évacuaient les hôpitaux du Borinage, Hélas, elles étaient surchargées.
La circulation se fait à sens unique vers la France et quelques véhicules particuliers ont pu charger et transporter les dernières victimes.
La frontière qui avait été ouverte aux évacués a été refermée après une demi-heure, sur ordre du commandement Allié afin de lui permettre de faire monter ses renforts en ligne vers ROISIN.
- 22h00 : Le château de Mr BATAILLE, 10 maisons de la rue Jules Pitot, 8 de la nouvelle place, la maison de Mr BERNIER rue du Tombois flambent à leur tour.
- 22h30 : Nous avons fermé les locaux de l'hôtel de ville et remis les clefs à Monsieur Maurice RICHARD.
- 23h30 : La maison de Mr le Docteur DELOUYS, le café de la couronne, la maison de couture Antoinette sont la proie des flammes.
27 immeubles flambent en même temps dans la nuit, la ville parait complètement en feu... Et nous sommes impuissants devant l'ampleur du désastre.
- 24h00 : Les services de garde civile cessent faute de moyens, après avoir épuisé toutes les possibilités, toutes les ressources, usé le peu de matériel dont ils disposaient.
Résumé des bombardements
Il y eut 43 alertes du 10 au 14 mai.
L'état d'alerte permanente fut décrété à partir du 15 mai
Il est tombé pour le bombardement du vendredi 17 mai 40 bombes explosives et de très nombreux chapelets de bombes incendiaires.
Il y eut pour les deux bombardements :
14 Mai : 35 morts et 25 blessés
17 Mai : 32 morts et 15 blessés
Conformément aux ordres reçus tous les gardes civils se sont dispersés.
Carte des Secteurs et Compte rendu des bombardements
Carte des Secteurs et Compte rendu des bombardements